Comment faire des produits numériques de manière responsable ?

  • mise à jour : 10 janvier 2022
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Sauf à faire partie de l'équipe fondatrice, nous n'avons pas de pouvoir pour changer la mission d'un produit. Nous héritons du choix de la structure dans laquelle nous travaillons. Pourtant, toute personne impliquée dans la création et l’évolution d’un produit peut agir pour rendre son Produit plus responsable.

Faire du Produit responsable quel que soit son poste

Que nous soyons Product Manager, designer, marketer ou développeur, nous avons une influence directe sur le comportement du produit, parce que nous travaillons sur tout ou partie du digital body du produit, ses “organes” externes comme internes. En tant que concepteurs, nous avons souvent davantage la main sur les organes externes, c’est à dire l’ensemble des points de contact qu’un utilisateur peut entretenir avec notre produit numérique : le produit digital lui-même (application) et ce qui l’entoure (pages web et stores applicatifs, notifications et emails, précision et disponibilité du support, APIs publiques….).

Les organes internes représentent ce qui lui permet de fonctionner : l’architecture technique, les bases et entrepôts de données (et ce qu’on y stocke), mais aussi l’organisation et les processus Produit. Ainsi, si nous sommes managers, nous avons un rôle supplémentaire à jouer. Comme l’édicte la Loi de Conway, notre produit est le reflet de notre organisation. Plus l’environnement de travail encouragera et récompensera les comportements responsables de ceux qui influent sur ce digital body, plus le produit lui-même se comportera de façon responsable.

Pour aller plus loin: Télécharge gratuitement notre livre Responsables

Faire des produits numériques de manière responsable quelle que soit la mission de l’entreprise

Distinguer le Pourquoi du Comment est une séparation artificielle : un produit numérique 100 % responsable devra cumuler des fonctionnalités (Quoi), un comportement (Comment) et une mission (Pourquoi) positifs et responsables. Or seule une infime partie des produits numériques pourra prétendre cocher ces trois cases.

Ainsi, une entreprise peut avoir une mission neutre, celle d'opérer son activité en faisant un bénéfice raisonnable, tout en concevant un produit au comportement exemplaire.

A l'inverse, une entreprise peut avoir une mission à impact positif, tout en créant une solution numérique dont le comportement induit un impact négatif sur l'environnement, sur l'économie ou sur les individus. Ses équipes auront donc une marge de progression côté Produit responsable.

Enfin, certaines entreprises donneront vie à un produit aux fonctionnalités certes plus responsables (à l'instar d'un produit bio / français), mais sans défendre un seul moment une cause autre que celle de l'entreprise elle-même (le profit). Certaines seront prêtes quitte à mentir s'il le faut, par exemple en s'inventant et en jouant sur l’authenticité d’une histoire... qui n'a rien d'authentique. Elles se targueront donc de fonctionnalités responsables, mais cumuleront un comportement et une mission qui ne le sont pas (ex: la marque Respire).

Distinguer Comportement et Mission permet donc:

  • Pour les produits à mission positive, de ne pas tomber dans l'écueil de "La fin justifie les moyens", une mission positive n'éclipsant pas un comportement imparfait.
  • Pour les produits à mission neutre, d'agir sur leur comportement pour les faire s'engager (et rester) sur un versant positif.

Faire des produits numériques de manière responsable, c’est prendre l’initiative

La conquête de nos vies par le numérique est-elle une bonne ou une mauvaise chose ? Ce n'est pas le sujet de ce livre. II en va de même des sujets à dimension politique comme la 5G, la surveillance, la censure ou la démocratie, traités de main de maître par des experts de ces domaines.

Le Produit responsable se concentre sur les responsabilités et les actions que peuvent mener les concepteurs afin de réduire l'empreinte de leur produit numérique.

Il ne s'agit pas de jeter votre produit à la benne ni d'ajouter un poids supplémentaire. La dette de responsabilité se gère comme une dette technique : en maintenant la qualité pour éviter de l'accumuler, en l'intégrant dans une refonte technique ou design quand nécessaire. En somme, réduire son empreinte signifie a minima réduire ses coûts ! Le Produit responsable demande simplement d'être intégré, par petites touches, tout au long de vos processus existants.

Malgré tout, deux phénomènes s’opposent parfois à notre entrée sur le chemin de la responsabilité.

Tout d’abord, l'immobilisme. Beaucoup des actualités liées à la responsabilité nous font prendre conscience du danger que nous encourons en tant qu'utilisateurs des produits numériques. Peu nous responsabilisent en tant que concepteurs. De surcroît, la plupart des débats manquent de pistes concrètes et actionnables données aux concepteurs pour améliorer l'empreinte de leurs créations. Le résultat est souvent un manque d'action : nous ne voyons pas si nous avons un rôle à jouer, et si oui, comment le jouer.

Ensuite, l'effet tunnel. Nous sommes souvent sensibilisés à un sujet en particulier, comme l'accessibilité par exemple, parce que nous avons lu un article ou assisté à une conférence qui lui étaient dédiés. Et s'ensuit parfois une épiphanie : nous devons agir ! Or, parce que nous n'avons vu que cette petite dimension de la responsabilité, nous laissons sans le savoir les autres dans nos angles morts. C'est ainsi que nous agissons, réduisant l'empreinte de nos produits d'un côté, mais l'augmentant de l'autre en toute inconscience. Il arrive même que nous améliorions l'empreinte pour un segment utilisateur, en l'aggravant pour un autre !

Un très bon exemple est le redesign de Twitteropéré en août 2021. La volonté de ses concepteurs était que le produit réponde aux règles d'accessibilité visuelle (ex : ratio de contrastes pour les textes). Le service communication de l’entreprise, tout comme l'équipe Design, a donc largement insisté sur ce point le jour de la sortie. Or, parce que les concepteurs se sont concentrés uniquement sur les référentiels, ils ont oublié l’essence même de l’accessibilité : que le plus grand nombre puisse l’utiliser. En décidant de changer la police d’écriture pour de simples raisons esthétiques, ils ont rendu le produit moins accessible pour les utilisateurs lambda (codes couleurs) que pour les astigmates (police de caractère plus difficile à lire).

Comment éviter l'immobilisme et l'effet tunnel ? Certainement pas en s'attaquant de front à toutes les dimensions de l'empreinte en même temps, tâche qui se révélerait rapidement décourageante... et finirait pas créer une nouvelle forme d'immobilisme.

La toute première action est de comprendre ce que recouvre l'empreinte de votre produit et de situer où l’on se trouve sur chacune de ses composantes. C’est l’idée du test de personnalité responsable du produit, que vous pourrez trouver en format numérique sur la page de notre livre Responsables ou en format papier.

Il s’agira ensuite d’utiliser le test avec l’équipe (qu’il s’agisse de la squad ou des autres Product Managers ou Designers de l’entreprise) pour les impliquer, puis avec des utilisateurs pour factualiser. Enfin, il ne restera plus qu’à prioriser les actions selon les résultats !

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