Comment intégrer l’IA dans votre produit

  • mise à jour : 22 avril 2024
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En 2024, l'Intelligence Artificielle (IA) confirme son statut de révolution technologique et de levier stratégique essentiel. Découvrez à travers les retours d'expérience de nos consultant·e·s comment intégrer efficacement l'IA dans votre produit pour résoudre des problèmes concrets et accroître sa valeur ajoutée.

L'Intelligence Artificielle (IA), c’est l’histoire d’une immense peur de rater le coche depuis le lancement de ChatGPT. Tout le monde en veut, mais sans forcément trop savoir pour quoi faire… Et si le secret n’était pas de faire de l’IA pour faire de l’IA, mais de la mettre au service de votre stratégie, vos objectifs et vos utilisateurs ?

🧐 Partir du problème à résoudre

L’IA ne diffère pas des autres améliorations que vous pouvez apporter à votre produit : avant de vous demander comment l’y intégrer, demandez-vous pourquoi. Il ne s’agit pas d’adopter l’IA pour l’adopter, mais de partir des problèmes rencontrés par vos utilisateurs ou votre organisation, et de l’envisager comme une solution parmi d’autres.

C’est d’ailleurs comme ça que de nombreuses entreprises ont intégré des fonctionnalités d’Intelligence Artificielle, bien avant le boom des IA génératives. Pendant des années, Facebook a par exemple confié à des armées d’opérateurs humains la besogne - ô combien répétitive - d’identifier le contenu violant ses conditions d'utilisation. Devant l’aspect chronophage et coûteux de pareille tâche, le géant californien s’est avisé d’en confier une grande partie à des algorithmes.

Si vous voulez que l’IA apporte réellement de la valeur à votre produit, le point de départ de votre démarche doit donc être une réflexion centrée sur le problème. Mais une fois ce dernier identifié, comment savoir si l’IA pourra y apporter une réponse satisfaisante ?

Trouvez votre Problem-solution Fit

Pour envisager l’IA comme solution potentielle, il faut en connaître les principaux types, et surtout les principaux cas d’usage. Il importe aussi d’avoir une bonne compréhension de ce que peut faire (ou pas) l’IA pour votre produit. Jennifer Palhares, consultante Thiga chez Tiime, solution de facturation et de comptabilité en ligne, en donne un exemple : “Aujourd'hui, chez Tiime, l'équipe Machine Learning automatise des tâches de pré-comptabilité comme la labellisation des transactions bancaires et des documents ainsi que leur matching. L’objectif est de réduire le nombre d'actions et donc le temps qu'un humain doit passer sur un dossier pour que sa comptabilité soit générée. C'est une vraie plus-value en temps et en énergie pour tous les utilisateurs.” Un cas d’usage qui montre que l’IA permet typiquement d’accomplir des tâches simples, mais répétitives. 

Si l’IA peut permettre de répondre à un problème donné, encore faut-il savoir prioriser les solutions potentielles (avec ou sans Intelligence Artificielle). Mon conseil : ne partez pas bille en tête et envisagez d’abord une solution sans IA. Si, par exemple, vous souhaitez mettre en place un moteur de recommandation personnalisée pour une plateforme vidéo ou un site e-commerce, commencez par déployer cette fonctionnalité sans IA. Cela vous permettra de valider votre Problem-Solution Fit et de vérifier que votre nouvelle fonctionnalité génère bien la valeur attendue. Avant de vous lancer dans de coûteux travaux d’automatisation, posez-vous toujours la question du coût d’opportunité : si vous pouvez réaliser telle tâche sans IA, quelle valeur supplémentaire apporterait l’IA, qui justifierait l’investissement requis ?

Commencez par un projet de petite taille, avec une faible complexité technique et une forte valeur ajoutée. 

Attention : comme le rappelle Haoitif Dellaoui, consultante pour Thiga chez La Centrale, “lorsqu’on parle de valeur délivrée par une IA, il ne s’agit pas seulement des performances techniques du modèle (sa précision, par exemple) mais de son impact sur les utilisateurs et le business”.

Sachez doser l’Intelligence Artificielle

Intégrer de l’IA à votre produit n’est pas un processus binaire : on peut mettre plus ou moins d’automatisation dans une tâche ou une fonctionnalité donnée. Sachez donc situer les différentes solutions possibles sur une échelle de l’automatisation.Différents niveaux d'automatisation

L’Intelligence Artificielle vous permet de viser différents niveaux d’automatisation des tâches, tant internes (effectuées par des collaborateurs) qu’externes (effectuées par vos utilisateurs ou clients).

Si vous débutez dans l’IA, ne perdez pas de vue les principes de l’agilité et commencez par un projet de petite taille, avec une faible complexité technique et une forte valeur ajoutée. Cela vous permettra d'avoir des résultats rapidement. En plus de satisfaire vos utilisateurs, vous évangéliserez à propos de l’intérêt de l’IA au sein même de votre organisation. À l’inverse, un premier projet surdimensionné risquerait de s’enliser… Et de décrédibiliser l’IA auprès de vos équipes !

À La Centrale, Haoitif Dellaoui a adopté cette méthode progressive pour concevoir une nouvelle solution d’IA permettant de modérer les messages : “​​L’approche itérative évite de se lancer dans des développements longs, fastidieux et sans garantie de résultats. Elle permet aussi de tester et analyser différents résultats et retours d'expérience du modèle sur une période définie. Grâce à cela, nous avons pu répondre aux objectifs métier établis dès le début du projet.”

Enfin, une bonne priorisation implique d’estimer le niveau d’effort requis par votre initiative. Afin d’en estimer la faisabilité technique et la complexité, vous aurez besoin de personnes compétentes en la matière. Ce qui nous amène à envisager les conditions nécessaires à la bonne planification d’un projet d’IA.

🤖 Prendre en compte les spécificités de l’IA

Entourez-vous des bons profils

Si vous décidez de vous lancer dans la grande aventure de l’Intelligence Artificielle, pensez d’abord compétences et entourez-vous de rôles clefs, qu’ils soient internes ou externes à votre organisation.

  • Les Data Engineers pour organiser et construire vos bases de données, sans oublier de développer les bons data pipelines pour les alimenter.
  • Les Data Scientists pour développer vos modèles.
  • Les Machine Learning Engineers pour les déployer en production.
  • Les Data Analysts, spécialement affectés à l’analyse des données si besoin.
  • Au moins un Data / AI Product Manager, ce type de PM qui a le vent en poupe. Il orchestre le travail de l’équipe, le coordonne avec les autres parties prenantes et s’assure qu’il sert les objectifs stratégiques de votre produit et de votre entreprise.

À noter que grâce aux progrès de l’IA générative, il est beaucoup plus facile de lancer des fonctionnalités d’Intelligence Artificielle sans recourir à des profils aussi pointus. Une équipe de développement classique pourra tout à fait développer certaines applications basées sur un LLM tiers : construire un chatbot alimenté par ChatGPT, utiliser des applications comme Dust ou Memory pour extraire des informations de documents ou pages web…

Préparez vos données

La deuxième condition pour intégrer de l’IA à votre produit, ce sont les données. Tout projet dans ce domaine nécessite de vous mettre en ordre de bataille pour pouvoir les collecter, les stocker et les exploiter correctement. Si vous n’en avez pas suffisamment, deux possibilités s’offrent à vous.

  • Mettez en place la collecte de ces données à l’aide de vos équipes data. Cela vous permettra de bénéficier de façon pérenne de données propriétaires dont vous contrôlerez la qualité. En revanche, cela vous demandera davantage de temps pour mettre en place la collecte, puis accumuler une quantité suffisante de données. 
  • Achetez des données tierces (parfois de manière complémentaire). Benjamin Danel, consultant Thiga pour un grand groupe de cosmétiques, témoigne : “Avant de lancer son outil d’analyse de peau, l’entreprise a acheté une banque de données avec des peaux de différentes teintes, présentant différents problèmes cutanés, afin de s’assurer de la pertinence de ce diagnostic et d’éviter un bad buzz non inclusif notamment.

Les différents types de données

Ne vous laissez pas arrêter par l’absence de zero/first-party data : vous avez toujours la possibilité d’acquérir des données tierces, collectées par d’autres entreprises.

Sensibilisez vos différentes parties prenantes

Dernière condition : l’acculturation de vos parties prenantes. Elles doivent être sensibilisées au fonctionnement général de l’IA, mais aussi à certaines de ses spécificités : 

  • Le timing d’un projet d’IA, potentiellement plus long que pour un projet classique, notamment au début de votre courbe d’apprentissage.
  • L’incertitude inhérente à tout modèle d’Intelligence Artificielle et la difficulté d’en garantir à l’avance les résultats.
  • Les risques à maîtriser, notamment en termes de confidentialité des données. Pour minimiser ces risques, la communication sera clef avec vos équipes de data science, afin de définir finement le besoin, et de délimiter clairement le projet – n’ayez pas les yeux plus gros que le ventre !

📱 Mettre du design dans ses fonctionnalités d’IA

Revenons maintenant à notre cycle de développement de produit IA : nous avons identifié un problème, priorisé une solution… Mais maintenant, comment la designer ?

Éva Zuliani, Product Designer chez Thiga, nous rappelle l’importance d’inclure les Designers suffisamment tôt dans la réflexion sur vos projets d’IA : “Concevoir une fonctionnalité IA sans Product Designers, c’est prendre le risque de concevoir des fonctionnalités mal reçues par les utilisateurs", souligne-t-elle. "Or, les Designers peuvent contribuer au moins sur deux temps forts : l’identification de cas d’usage où l’IA serait pertinente, et la conception des fonctionnalités en tant que telles. Il revient aux PMs de maîtriser l’art subtil de délivrer aux Designers le juste niveau d’information technique !

Un cas typique de réflexion Design appliquée à une fonctionnalité d’IA ? La question de la transparence. Comment faire savoir à vos utilisateurs qu’ils utilisent une fonctionnalité reposant sur de l’Intelligence Artificielle, tout en intégrant cette fonctionnalité de façon fluide dans votre UX ? Ci-dessous l’exemple de Notion, où le recours à l’IA est à la fois intégré dans le module de recherche mais reste identifiable par son emplacement et son identité visuelle spécifique (notamment la couleur violette, fréquemment appliquée à l’IA).

Mise en avant de la recherche assistée par IA sur Notion.

N’oubliez pas, en matière d’IA, le déploiement n’est pas une fin. Ce n’est que le début d’un processus de mesure et d’amélioration continue : il serait dommage de ne pas capitaliser sur ce qui fait justement la force du machine learning, à savoir la faculté d’un modèle à apprendre et à s’améliorer sur la base des données qu’on lui fournit ! D’où l’importance de mettre en place des procédures de collecte de données (passives) et de prise en compte du feedback (actif).

En conclusion, retenez qu’il est certes critique de ne pas rater le train de l’Intelligence Artificielle, mais qu’il l’est tout autant de la mettre au service de votre stratégie, de vos objectifs et de vos utilisateurs. L’IA n’est pas une finalité, juste un moyen d’être plus efficace.

C’est à ce prix que vous intègrerez l’IA dans votre produit de manière ambitieuse mais réaliste, innovante mais maîtrisée. À vous de jouer !

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