Product Management : les bonnes pratiques de Box.com

  • mise à jour : 03 octobre 2015
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Bonjour les product guys,

À l’occasion du Product Tank #18, nous avons eu la chance d’accueillir Florian Jourda, un des tout premiers employés de la startup californienne BOX (qui n’en est plus vraiment une). Après 10 ans passés dans la Silicon Valley, Florian vient de rentrer en France pour de nouvelles aventures et il nous a fait le plaisir de venir nous parler de son expérience américaine. C’était passionnant !

Avant de rentrer dans le coeur de la présentation, quelques mots sur la forme. Florian nous a fait un talk d’une heure sans slide, sans pause et sur un rythme effréné. J’ai été très séduit par le mode « sans slide » : notre attention est centrée sur la voix du speaker et nous ne sommes pas distraits par un powerpoint dont on ne lit que rarement le contenu. Alors évidemment il faut pouvoir se le permettre ! Il faut maitriser parfaitement son sujet et savoir maintenir un fil conducteur pendant 1h. Bref, c’était une belle performance de ce point de vue là et une source d’inspiration pour ceux qui étaient dans la salle.

Le fond maintenant ! Florian nous a fait le récit d’une success story à l’américaine, celle que l’on rêve tous de vivre. L’histoire des jeunes entrepreneurs brillants qui ont disrupté le monde de « l’enterprise software.» Tout y est, les premiers recrutements dans un bar, la première levée de fonds de 350 k€ sur un mail bien tourné, la cool attitude, les levées de fond successives, le « we ran out of cash » pendant la crise jusqu’à l’IPO au NYSE il y a quelques mois.

En 1h, Florian a balayé de très nombreux sujets : la croissance, le recrutement, l’organisation interne, la communication, le marketing, la concurrence mais aussi les difficultés rencontrées par une boite qui en 8 ans est passée de 4 à 1200 employés et de 0 à 32 millions d’utilisateurs….

Je ne vais pas vous faire un CR détaillé de tout ce que nous a dit Florian, j’en serais de toute façon bien incapable. En revanche, je vais vous partager les quelques points qui m’ont le plus marqués.

Coopétition plus que compétition

Box, c’est avant tout une vision. L’idée que dans quelques années tout sera « cloud ». La société est un des pionniers dans ce domaine. Seul sur son créneau dans ses premières années, Box a vu arriver Dropbox et les solutions de grands éditeurs comme Salesforce et Microsoft.

Face à la concurrence, la tentation est de rentrer dans une compétition frontale. Untel sort une nouvelle feature, il faut se dépêcher de sortir la même, un autre est victime d’une faille de sécurité, et on est tentés de le pointer du doigt. Ce n’est évidemment pas la bonne attitude.

Quand on est dans un océan bleu, sur un marché peu mature et de très grande taille, il n’y a aucun bénéfice à critiquer gratuitement un concurrent ou à empiéter sur ses plates bandes. Les concurrents, comme vous, vont évangéliser du marché et cela sera bénéfique pour tout le monde.

Toutes proportions gardées, c’est une problématique que nous connaissons bien dans le monde du conseil, entre cabinets concurrents nous nous battons la journée pour gagner des clients mais nous nous retrouvons le soir pour partager et contribuer à la diffusion de notre philosophie.

Un business model au service d’une vision long terme

Box fait partie de ces boites dont le marché potentiel est colossal (l’intégralité des sociétés mondiales). Si on se limite à une vision court terme, sur une année, un client a un coût d’acquisition supérieur à ce qu’il rapporte. Mais la rétention est forte, un client qui part avec Box va sans doute rester pendant des années et le gain marginal va augmenter.

BOX n’a aucun intérêt à chercher la rentabilité instantanée, l’objectif est de continuer a investir massivement dans la conquête et de faire du « land grab ».

Il est évident que c’est un modèle qui nécessite d’avoir à ses côtés des investisseurs capables de s’engager sur le long terme et d’adhérer à une vision, mais c’est une philosophie ambitieuse dont nous devons nous inspirer.

Beaucoup de boites sont mortes à cause de visions trop court termistes. Cela me fait penser à un talk de Jean de la Rochebrochard (The Family) sur la levée de fonds. Il insiste sur un point très pertinent : trop d’entrepreneurs voient la levée de fonds comme un objectif à part entière alors que cela doit être un non événement. L’argent levé sert à financer une vision, ce n’est pas un accomplissement. L’idée est la même, la recherche de profits instantané peut être un frein énorme au passage à l’étape supérieure.

Recrutement et culture d'entreprise

Florian a énormément insisté sur le recrutement. Au delà du processus de recrutement, ce qui m’a le plus marqué c’est que BOX attache autant d’importance à l’état d’esprit qu’aux compétences techniques. Nous avons tous vécu cette expérience de travailler avec un quelqu’un dont on dit « c’est une star mais il est invivable ». Pas de ça chez BOX. Dans une boite qui double de taille tous les ans, l’important c’est de construire en permanence sur des bases solides.

Une agilité pragmatique

Pour conclure son talk, Florian nous a parlé d’organisation interne et de méthodologie. Le public était composé en majorité de Product Managers « agiles », Florian a donc été très questionné sur ces problématiques auxquelles nous sommes tous confrontés au quotidien.

Florian nous a vanté une agilité extrêmement pragmatique qui de mon point de vue repose énormément sur la capacité des équipes à être autonomes sur leurs sujets. Chez BOX, la stratégie de l’entreprise à long terme est claire et est transmise aux équipes de manière top down. Mais ce qui est intéressant c’est la posture des product managers et des VP, il ne s’agit pas d’imposer la vision aux équipes mais de leur vendre. En persuadant les équipes que la stratégie est la bonne on s’assure d’avoir des gens motivés qui partagent les mêmes objectifs et qui ont une vision claire de leur rôle dans l’organisation.

Côté méthodo, les équipes de BOX travaillent en Scrum mais chaque équipe est libre d’implémenter ses propres artefacts. Pas de PO pour établir une liste précise de user stories mais plutôt un PM en charge de discuter avec les bonnes personnes, de transmettre la vision à son équipe et si nécessaire de prioriser.

Petite parenthèse, je pense qu’il est difficile de comparer ce qu’a vécu Florian chez BOX avec le quotidien de PME/grandes entreprises françaises. Florian a eu la chance de travailler avec des gens exceptionnels, en particulier des ingénieurs triés sur le volet qui ont été recrutés pour leurs qualités techniques mais aussi leur autonomie, leur capacité à appréhender les sujets et à être force de proposition. Cela peut faciliter les choses. Je ne dis pas que les ingénieurs français ne sont pas compétents, bien au contraire, mais tout le monde n’a pas le luxe de pouvoir constituer des équipes de top gun (attractivité de la boite, capacité financière ..).

Component team ou feature team ?

Avant de pouvoir prendre une petite bière bien méritée, Florian a eu le droit à la question qui hante les coachs agiles : component team ou feature team ?

Sans surprise, pas de réponse catégorique mais là encore une approche très pragmatique : pour de nouveaux produits autonomes, plutôt s’orienter sur des features teams. Sur de gros produits historiques, l’approche component reste pertinente. Florian nous a donné l’exemple ultra classique d’une équipe back-end qui construit une API consommée par plusieurs équipes front. Que ce passe t’il quand l’équipe mobile a besoin d’une petite modification dans l’API mais que ce n’est pas dans le backlog de l’équipe API ? Pas de problème, un des développeurs de l’équipe mobile va passer une ou deux itérations dans l’équipe API, ainsi il peut agir directement dans le back tout en étant soumis aux mêmes revues de code que le reste de l’équipe, ce qui garantit la consistance de l’API.

Pour finir ce billet, je tiens encore une fois à remercier Florian pour son talk très inspirant. Je vous donne rendez-vous le mois prochain pour le Product Tank #19

 

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