UX Days 2025 : 5 talks Design qu’il ne fallait pas manquer

  • mise à jour : 05 juin 2025
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Les 22 et 23 mai avaient lieu les UX Days, le plus important évènement Design en France organisé chaque année par Flupa. Alors que la discipline traverse un moment charnière, bouleversée par le contexte économique et l’intelligence artificielle, cette édition était attendue. Sénior Product Design Manager chez Thiga, Antoine Voland-Logerais était invité en tant qu’orateur, pour son talk Des nains sur les épaules des géants - Comprendre hier pour designer notre métier demain. Pour vous, il revient sur les moments des Flupa UX Days 2025 qui l’ont marqué.

L’ambiance des Flupa UX Days 2025 était, comment dire… particulière. Comme si la communauté du Design, à l’image du monde du Produit en général, avait conscience du tournant auquel nous faisons face. La situation économique pèse, l’arrivée de l’IA redistribue les cartes, et les repères historiques vacillent. Il y avait quelque chose de flottant dans l’air — une forme de malaise, de quête de sens collective.

Au milieu de cette incertitude, une question : comment rendre le futur à nouveau désirable ? Durable, inclusif, responsable. Un futur qui ne se contente pas d’être performant, mais qui soit aussi vivable, soutenable, et partagé. Chaque talk, à sa manière, a tenté d’y répondre. Avec humour, radicalité ou pragmatisme. 

Et c’est ce qui a donné toute sa valeur à cette édition : cette volonté partagée de designer autrement. Pour vous, je reviens sur les 5 conférences qui m’ont le plus marqué lors de ces UX Days 2025.

Découvrez les 5 softs skills essentiels du Product Designer de demain !

🏭 "Design à l'ère de l'IA générative", par Anne Asensio

Après une longue carrière chez Renault, Anne Asensio pose ses valises chez Dassault Systèmes. Son expérience du Design industriel apporte une autre perspective sur notre métier. On ne parle pas juste d’interfaces ou d’écrans, mais d’environnements, de systèmes embarqués dans des avions ou des voitures. Et ça change tout. Ces industries ont souvent une longueur d’avance dans leurs outils et leurs façons de penser. D’ailleurs, lors de son talk, Anne Asensio a évoqué l’utilisation de “jumeaux numériques” par Dassault Systèmes : des environnements 3D capables de simuler la réalité avec une finesse incroyable, pour tester des Designs dans des conditions quasi réelles. 

Forcément, j’ai tout de suite pensé à nos propres pratiques ! Il y a un grand débat actuellement sur l’usage des synthetics users — des agents IA capables de simuler des comportements utilisateurs. Beaucoup doutent de leur pertinence. Je pense au contraire qu’ils peuvent nous permettre de créer l’équivalent de ces “twins” que l’on trouve dans l’industrie automobile / aéronautique. Imaginez : vous balancer une maquette dans un environnement simulé pour avoir des feedbacks en temps réel et ajuster vos maquettes au fil de l’eau. Puissant. Surtout à l’heure où les agents naviguent eux-mêmes de plus en plus à la place de nos utilisateurs.

🪜"AccessibilityOps : passer l'accessibilité à l'échelle", par Anne-Sophie Tranchet

L’intervention d’Anne-Sophie Tranchet, experte en UX et en accessibilité chez betagouv.fr, portait sur une question essentielle : comment intégrer l’accessibilité dans l’organisation, pour que ce ne soit plus juste une affaire d’experts, mais bien une responsabilité collective. Alors certes je n’y ai pas découvert de nouvelles pratiques en tant que telles. Pour autant, j’ai trouvé son approche “Ops” particulièrement inspirante : traiter l’accessibilité comme un sujet systémique, transversal, structurant. C’est très malin, et on devrait tous s’en inspirer. On a tendance à penser l’accessibilité comme une affaire de designers et de devs. Mais en réalité, c’est un sujet qui concerne tout le monde : marketing, produit, contenu, support…

Son talk m’a fait réfléchir à l’idée d’un pilotage organisationnel pour lancer ce genre de transformation. Un peu comme les Chief Digital Officers chargés, fut un temps, d’accélérer la transition numérique. Aujourd’hui, on pourrait avoir des Chief Accessibility Officers pour poser le sujet, lui donner du poids, structurer la démarche. Et, à terme, quand la culture est intégrée, ces rôles peuvent s’effacer. Cette conférence m’a conforté dans une conviction : certains sujets, comme l’accessibilité ou l’IA, doivent devenir des réflexes dans nos process. 

💡"Comment documenter des Design Systems qui encouragent la pensée critique", par Sílvia Grisó Sayas

À première vue, le sujet peut sembler périphérique. Après tout, parler de documentation dans un Design System, ça ne fait pas rêver tout le monde. Et pourtant, ce talk m’a beaucoup fait réfléchir. Sílvia travaille chez Qonto, où la manière d’écrire la documentation Design a énormément évolué. Là où elle était auparavant très prescriptive, du style “il faut faire comme ça”, ils ont basculé vers quelque chose de beaucoup plus explicatif, didactique même : on explique le “pourquoi” derrière chaque recommandation.

Et ce shift est fondamental. Parce que si on impose des règles sans les expliquer, on forme des exécutants. Des gens qui appliquent sans comprendre. À l’inverse, si on prend le temps de partager le “pourquoi”, on élève les équipes : on leur permet de s’approprier les bonnes pratiques, d’en faire des réflexes, et de prendre des décisions pertinentes même quand le cadre n’est plus défini. On les prépare à l’inédit. Le plus dur dans un Design System n’est pas de le construire techniquement, mais d’embarquer les collaborateurs. Et c’est exactement le cœur du talk : le Design System, ce n’est pas juste une bibliothèque de composants. C’est une culture partagée, qui se transmet aussi par la documentation, et par la manière dont on développe l’esprit critique au sein des équipes. Et ce faisant, on les rend meilleures.

👊 "Each design is a manifesto for the future", par Thorsten Jonas

Thorsten Jonas est un designer engagé qui défend une conviction forte : chaque décision de Design, même minuscule, a un impact. Sur l’environnement, sur la société, sur les usages. Et il faut en prendre conscience. Ce qu’il dit, c’est que notre responsabilité en tant que Designers ne s’arrête pas à l’interface. Chaque microdécision que l’on prend (un autoplay vidéo, une animation lourde, une architecture complexe) a une conséquence. On consomme plus de données, le parcours est plus long, on exclut plus de personnes… En parlant de ça, il propose d'ailleurs une inversion intéressante. Nous, Designers, nous demandons souvent pour qui nous concevons un produit. Thorsten invite à se demander pour qui on ne le conçoit pas, et pourquoi. Il ne s’agit pas d’arrêter d’innover, mais de le faire en pleine conscience des conséquences.

Ce que je retiens surtout de son manifeste, c’est cette idée de triple impact. On pense naturellement à l’impact business et à l’impact utilisateur. Mais il faut y ajouter l’impact environnemental. Aujourd’hui, nos briefs Design, nos business cases, nos frameworks Produit et Agiles (comme SAFe) ne prennent pas cette dimension en compte. Et pourtant, elle est cruciale. C’est un peu comme ce qui se passe dans la comptabilité : on parle maintenant aussi de triple comptabilité, qui ajoute à la performance économique les performances sociale et environnementale. Je pense qu’on doit faire pareil en Design. Il est temps de mettre à jour nos méthodes, nos critères de décision, nos frameworks, pour intégrer pleinement cette conscience écologique.

⭐️ "FAMOUS : lessons learned from the most iconic (and maybe the most underrated) product of our time", par Michael Baeyens

Franchement, en lisant le titre, je ne savais pas du tout à quoi m’attendre. Et puis Michael Baeyens est monté sur scène… et c’était du grand spectacle, avec un “Mitch” bien en forme. Un talk hyper immersif, léché, drôle, instructif. Une masterclass de storytelling, autant qu’un vrai moment d’inspiration. Le pitch : décortiquer la carrière de Taylor Swift pour en tirer 5 ou 6 leçons applicables au Product Design. Et honnêtement, ça tient la route. Michael est un fan assumé, donc c’était ultra documenté, et surtout brillamment mis en scène.

Ce que j’en retiens :

  • Un produit authentique : Taylor Swift a toujours été fidèle à elle-même, dans sa musique comme dans sa communication.

  • Un produit maîtrisé : elle pilote sa carrière de A à Z. Elle est aux commandes de son art, de son image, de sa relation aux fans.

  • Les Easter Eggs : cette capacité à teaser, surprendre, jouer avec les signaux faibles. Une vraie stratégie d’engagement.

  • Le lien avec la communauté : elle entretient une relation forte, intime, avec son audience. Elle ne parle pas à ses fans, elle parle avec eux.

  • Et surtout : l’acceptation de sa vulnérabilité, ce qui crée une connexion encore plus forte.

Cette conférence m’a fait réfléchir à l’importance de la “personnalité” des produits. On parle beaucoup d’impact business, de ROI, de métriques. Et c’est évidemment nécessaire. Mais on oublie parfois que ce qui fait la différence entre un produit fonctionnel et un produit culte, ce sont des éléments moins mesurables : la créativité, la sensibilité, la culture de marque, la capacité à surprendre, à engager émotionnellement. J’ai trouvé ça salutaire. Parce qu’à force de vouloir tout rationaliser, on risque de perdre ce qui rend un produit vivant, singulier, désirable. Et en 2025, dans un monde de plus en plus automatisé et standardisé, ces dimensions-là deviennent des avantages concurrentiels à part entière. 

Alors oui, je le répète, on sent que la communauté est à un moment charnière, entre incertitude économique, réinvention des rôles et injonctions à faire mieux avec moins. Mais sommes-nous résignés ? Non ! Je repars des UX Days avec autre chose que ce constat : une envie renouvelée d’agir, et surtout, la conviction qu’on a les outils pour le faire.

Le Design a toujours été un levier de transformation. Et aujourd’hui plus que jamais, on peut (et on doit) l’utiliser pour construire des produits qui assument leur triple impact : humain, environnemental, business. Il faudra parfois faire preuve de plus de radicalité, sortir des sentiers battus, être un peu moins lisses. Mais on a les bases, on a la créativité, et on a une communauté qui a envie de faire bouger les lignes. 

Ce qu’il nous manque ? Peut-être une posture plus affirmée. Un leadership plus clair. Une capacité à relier nos convictions à des enjeux business concrets — pour ne plus avoir à choisir entre éthique et performance, mais montrer que l’un nourrit l’autre. Parce que c’est aussi ça, le message des UX Days 2025 : responsabilité, accessibilité, durabilité… sont des opportunités. À nous de les saisir.

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